Allergies alimentaires : comment gérer la scolarité ?
Chaque année, la rentrée scolaire est source d'inquiétudes, qui s'amplifient grandement lorsque les enfants sont allergiques. Or l'intégration dans le milieu scolaire est une étape extrêmement importante dans la vie d'un enfant. L'Association française des polyallergiques peut apporter aide et soutien concret aux parents, notamment dans les démarches à entreprendre pour la mise en place du projet d'Accueil individualisé. Caroline Morice, présidente de l'Association, répond à nos questions.
cuisinedumaroc: Pourriez-vous nous rappeler ce qu’est le PAI ?
Caroline Morice : Le PAI ou Projet d'Accueil Individualisé est un document où sont précisées toutes les dispositions nécessaires à la vie en collectivité pour un enfant souffrant d'une maladie évoluant sur une longue période. Cette procédure a été instaurée en 1999 par l'Education nationale. Depuis septembre 2003, le PAI implique l'ensemble des structures d'accueil de l'enfant : restauration scolaire, établissements d'accueil de la petite enfance, centres de vacances et de loisirs et établissements agricoles.
L'une des pathologies les plus représentées parmi les PAI est l'allergie alimentaire (en deuxième position après l'asthme), parce qu'elle suppose un certain nombre d'aménagements du mode de vie de l'enfant, comme par exemple le respect d'un régime d'éviction alimentaire, et parfois la disponibilité rapide de médicaments en cas de réactions.
Le PAI est l'aboutissement d'une concertation entre les différentes parties intervenant auprès de l'enfant : famille, établissement scolaire et souvent municipalité (en charge de la restauration scolaire et des garderies pour les écoles maternelles et élémentaires), afin de décider ensemble des aménagements adaptés à l'état de santé de l'enfant, et compatibles avec la vie collective. Cette réflexion d'ensemble se fait sous la coordination du médecin scolaire, et à partir des besoins spécifiques de l'enfant prescrits par le spécialiste traitant.
On décidera ainsi par exemple des modalités de prises des repas (adaptation simple des menus habituels, paniers repas…), de la manière dont l'enfant participera à un atelier cuisine (en apportant sa propre recette, en étant responsable du reportage photo, en s'occupant de la décoration…), des précautions éventuelles en cas d'activités sportives, de sorties extrascolaires… en tenant compte à la fois des pratiques et projets pédagogiques de la classe, des possibilités d'accueil du service de restauration scolaire, et des besoins propres de l'enfant (l'allergie est une pathologie dont la prise en charge est très variable d'un enfant à l'autre, en fonction des allergènes incriminés et des types de réactions provoquées). Lorsque l'état de santé de l'enfant le nécessite, un protocole de soins d'urgence indique pour certains signes d'appel la conduite à tenir par les adultes présents auprès de l'enfant, dans l'attente de l'intervention des secours.
cuisinedumaroc: Quelles démarches doivent effectuer les parents ?
Caroline Morice : C'est aux parents qu'il revient de faire la demande de PAI auprès du médecin scolaire. Lorsqu'il s'agit d'une première demande (entrée en maternelle), il importe de le faire suffisamment tôt dans l'année en prévision de la rentrée scolaire.
La famille doit accompagner sa demande de la prescription du médecin qui suit les allergies de l'enfant (indiquant les besoins spécifiques de l'enfant et le protocole d'intervention d'urgence) et d'un bilan allergologique complet et récent.
C'est ensuite au médecin scolaire d'initier la mise en place du PAI.
cuisinedumaroc: Comment les parents peuvent-ils aider leur enfant à vivre sa différence et ses contraintes au milieu des autres enfants à l’école ?
Caroline Morice : L'enfant a besoin d'être en confiance avec les personnes qui s'occupent de lui à l'école. Il a besoin de sentir que ses parents font confiance à d'autres adultes. Il faut parfois du temps pour que cette relation se mette en place. Il revient aux parents de favoriser toujours le dialogue, en étant à l'écoute des craintes et des réticences éventuelles, légitimes, de ceux qui ne connaissent encore ni l'enfant, ni sa pathologie.
Mais l'enfant ne pourra vivre correctement ses allergies au milieu des autres que si déjà à la maison, il fait l'expérience d'une gestion et d'une acceptation minimum de sa différence : savoir refuser les échanges alimentaires non autorisés et surtout savoir profiter de la présence des autres, même s'il ne partage pas les consommations alimentaires à l'identique… si besoin est, il ne faut pas hésiter à aider l'enfant à formuler ses déceptions, à prendre le temps de les lui expliquer même s'il est très jeune.
L'allergie alimentaire d'un enfant conduit parfois à un repliement sur soi de la famille tant les loisirs et déplacements hors foyers peuvent devenir compliqués : maintenir une vie sociale suffisamment riche, où le régime a sa place sans monopoliser toute l'attention des parents, est un préalable important à la vie en collectivité de l'enfant.
cuisinedumaroc: Quel est le rôle de l’Association française des polyallergiques ?
Caroline Morice : L'association a pour but de créer un réseau de solidarité entre les familles. Parfois, à l'occasion du diagnostic ou d'une étape importante comme l'entrée à l'école ou le passage à l'adolescence, les parents ont besoin d'informations pour mieux comprendre ce qu'ils doivent ou peuvent faire au quotidien. Nous essayons de leur apporter l'écoute et/ou les renseignements dont ils ont besoin. Nous pensons que c'est par ces échanges et les rencontres entre familles que nous nous apportons mutuellement des idées et des solutions pour vivre au mieux les allergies au quotidien.
Par ailleurs, l'association mène des actions de fond pour faire connaître la pathologie, en faire progresser la prise en charge (médicale, scolaire, alimentaire…) et sensibiliser à ses conséquences sociales et psychologiques, de manière raisonnée et ouverte à la vie et l'épanouissement des personnes allergiques.